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Collège Kandelaft, Chazay d'Azergues

"La vie d'Esther Minkowski"

 

Ety   : Je l’ai dit au procès, personne ne nous croira.

Jamais personne ne croira ce que l’on a subi ici.

Ça sera impossible à raconter. 

 Je suis née à Przytyk en Pologne en 1920.

Il y avait plus de juifs que de polonais. C’était une vie juive,

il y avait la synagogue, la vie était très marquée par la vie religieuse

 

Narrateur

Esther vit avec sa famille dans un shtetl, village où la population parle yiddish.

Six enfants sont nés en Pologne: Berthe, Herman, Suzy, Maurice et Yvece. 

Esther est la cadette, elle est appelée Ety par ses frères et sœurs.

En 1926, l’antisémitisme, très fort, pousse le père d’Esther à quitter la Pologne pour la France.

Avant 1938, 3,5 millions de Juifs vivent en Pologne.

 

 

Ety : « la France, c’est le pays de la liberté, tout le monde aime les Français ! Quand on est arrivé, on est tout de suite allé à l’école à Paris.

On travaillait très bien à l’école, c’est arrivé que des maîtresses nous disent parfois « sale juif ». Oui c’est arrivé. Avec Berthe, ma sœur aînée,

on était les premières de la classe,

on a même aidé les autres ! La vie était beaucoup plus

agréable qu’en Pologne. 

On ne savait pas exactement ce qu’il se passait. 

Mais parents eux ils savaient….

ils accueillaient sans cesse des Polonais qui arrivaient à Paris ».

 

Narrateur

En 1928, la famille quite la Pologne pour rejoindre leur père

qui travailleà Paris. 

En 1933, Hitler arrive au pouvoir en Allemagne.

Hélène et Léon viennent agrandir la famille Minkowski

Le 9 mars 1936, la communauté juive de Przytyk subit un violent pogrom 

 

 

Ety : « on avait l’impression que rien ne pouvait nous arriver…..

pourtant il y avait des signes.

L’exode ???....... un cauchemar !!

c’est dans le camion de notre voisin ferrailleur que nous avons fui Paris,

  il y avait des cadavres le long des routes.»

 

Narrateur

En 1940, la France est envahie en quelques semaines 

Le 22 juin 1940, le maréchal Pétain signe l’armistice avec l’Allemagne nazie. C’est la débâcle. La famille d’ETY quitte Paris pour le département des Deux-Sèvres afin de rejoindre Berthe et son mari. 

Le 10 juillet 1940, le régime de Vichy est mis en place. Le Maréchal Pétain obtient les  pleins pouvoirs. 

La famille revient ensuite s’installer à Paris. 

 

 

Ety : Mais oui !! on nous a dit de porter l’étoile … on portait l’étoile jaune. On nous a dit de se faire recenser, on s’est fait recenser. On nous a dit de monter dans le dernier wagon qui était réservé aux juifs, et bien on est monté dans le dernier wagon !

 

Narrateur :

 En octobre 1940, le régime de Vichy met en place des lois antijuives, qui excluent les juifs de la société française.

Le 24 octobre 1940, le régime de Vichy entre dans la collaboration avec le régime nazi.  

 

 Ety : « Le 20 août 1941, mon père est arrêté par des SS et des policiers français.

Mon frère Maurice est malade, il est trop jeune et il échappe à l’arrestation. Mon père est interné à Drancy, qui est encore en chanOer. On ne voulait pas croire ce qui nous arrivait.»

 

Narrateur :  

Les arrestations et les rafles commencent. 

Le 29 juillet 1942, le père d’Ety est déporté à Auschwitz-Birkenau avec 1000 autres personnes après des mois à Drancy, dans -des conditions sanitaires effroyables.

 

Ety : « Bande de sales juifs, quand est-ce qu’on sera débarrassé de vous,

je ne sais pas ce qui m’arrête de vous dénoncer ! » nous dit le chauffeur du camion qui nous fait passer la ligne de démarcation à la fin de l’été 42. Mon petit frère Léon a six ans, il est pas facile, il promet de pleurer

et de faire beaucoup de bruit au passage entres les 2 zones.

Heureusement, il s’endort à ce moment-là et nous arrivons près de Vichy et rejoignons ensuite Lyon.

 

Narrateur :    

La famille se réfugie en zone libre à Lyon. 

Mais le 11 novembre 1942, cette zone est aussi occupée par les troupes allemandes, en réponse au débarquement allié en Afrique du Nord.

 

Ety :  « J’ai des faux papiers, je m’appelle Geneviève Meyer, mais je n’ai pas vraiment conscience que Meyer est un nom de famille mixte et… souvent juif. C’était Cours Verdun, j’arrive toute guillerette, je vois deux allemands et des miliciens, « Police allemande, ne bougez plus »,

me dit un Allemand avec un accent très fort.  Je le reconnaîtrai des années plus tard, c’est Klaus Barbie.

Nous sommes le 15 juin 1944. 

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Narrateur :

Ety est internée à Montluc, une ancienne prison militaire lyonnaise,

réquisitionné par les autorités nazies depuis février 1943. 

Les conditions carcérales sont terribles et la surpopulation est très importante.

Le 30 Juin 1944, elle est transférée à Drancy en région parisienne.

 

Ety : Je suis déportée le 31 juillet 1944, par le Convoi 77. C’était affreux,

nous étions débout, des femmes, des hommes et des enfants.

C’est inimaginable. On ne pensait qu’à une chose, on sera peut-être

libéré pendant le trajet. Le voyage a duré 3 jours, sans boire,

sans manger, des gens meurent dans le wagon.

 

Narrateur :  

Le 31 juillet 1944, le Convoi 77 quitte la gare de Bobigny avec plus

de 1300 femmes, hommes et enfants pour  Auschwitz-Birkenau dan

s des wagons à bestiaux.  Plus de 300 enfants dont 18 nourrissons

sont déportés dans ce convoi.

 

Ety  : la descente du wagon est difficile, nous sommes très nombreux,

des SS en cirés noirs nous hurlent dessus. C’est la sélection.

Mon groupe de femmes est envoyé en courant vers un bâtiment,

on nous ordonne de nous déshabiller. On nous rase les cheveux. 

Je suis tatouée : A16769  

 

Narrateur :

Ouvert en 1940, Auschwitz-Birkenau est le plus grand camp de concentration du régime nazi. 

C’est aussi le plus meurtrier des sites de mise à mort.

1,1 million de personnes y sont mortes, 960000 étaient juives.

 

Ety : J’avais un moral de fer, même aux pires moments à Auschwitz, je disais

« tenez bon les filles, on va être libres, c’est pas possible que ça dure plus

longtemps ! ». Elles me le disent tout le temps « il n’y avait que toi

qui disais qu’on allait être libérées ».

 

Narrateur : 

 Coups, travail forcé, sous nutrition et régime de terreur

rythment les journées au camp. 

En Octobre 1944, Esther est transférée

à Kratzau, dans la région des Sudètes.

 

 

Ety : Juste avant le transfert à Kratzau, on nous a dit qu’o

n ne servait plus à rien et qu’on allait passer à la chambre

à gaz. On nous a laissées une journée, nues, à Auschwitz.

Finalement, on a été transférées dans une usine d’armement,

il faisait très froid. On travaillait 8 jours de nuit,

8 jours de jour, seulement des femmes…… c’était pire qu’Auschwitz.

 

Narrateur :

Kratzau abrite des usines d’armement pour la fabrication des V2.

Des centaines de femmes y sont soumises au travail forcé.

 

Ety : Enfin libre ! je demande en yiddish à 2 officiers soviétiques s’ils sont juifs.

Ils me comprennent et nous emmènent dans une ferme voisine du camp

et ordonnent à la fermière de nous nourrir.

 

Narrateur : 

En mai 1945, Ety est de retour en France le 13 Juin 1945. 

-Elle fait partie des 2500 rescapés de la Shoah parmi les 76 000 déportés depuis la France.

Esther Majerowicz témoigne le mardi 26 mai 1987 à Lyon, lors du procès de Klaus Barbie, jugé pour crimes contre l’humanité.

Sa parole sera recueillie dans un témoignage écrit intitulé Sauve qui rêve  et  lors de deux interviews filmées en 1996 et en 2001 .

 

 Ety:

« Je l’avais dit … personne ne nous croira. Jamais personne ne croira ce que l’on a subi ici.

 Ça sera impossible à raconter.»

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